On sait que les personnes en situation de handicap font face à des obstacles innombrables dans leur vie quotidienne. Elles sont souvent discriminées dans leur participation à la vie sociale et aux activités de loisir, par manque d’accessibilité et de mesures d’inclusion.
L’Organisation mondiale de la Santé indiquait d’ailleurs en 2018 que les personnes handicapées sont « 4 fois plus nombreuses à faire état de mauvais traitements [de santé] et presque 3 fois plus nombreuses à déclarer avoir été confrontées à des refus de soins. » Et c’est encore plus flagrant chez les personnes issues de groupes marginalisés, dont les Premières Nations.
Novembre est le Mois de la sensibilisation aux personnes handicapées autochtones et c’est l’occasion de se pencher sur la réalité de ces personnes des Premières Nations qui sont en situation de handicap.
Stigmatisation et discrimination
Les statistiques montrent que le taux d’incapacité des populations des Premières Nations au Canada est plus élevé que celui du reste de la population. Plusieurs obstacles sociétaux agissent comme facteurs aggravants et limitent l’accès des personnes autochtones, handicapées ou non, aux ressources et aux services nécessaires pour mener une vie épanouie et en santé.
Bien sûr, la stigmatisation et la discrimination systémiques des Autochtones sont des enjeux importants. La peur d’être traité de façon raciste par les professionnels de la santé a un impact important sur le bien-être des personnes autochtones.
L’exemple de Joyce Echequan est bien connu au Québec puisqu’il s’agit d’une situation tragique ayant été grandement médiatisée, mais il y a plusieurs autres cas connus où des personnes autochtones ont fait face à un traitement discriminatoire dans le système de santé.
Par exemple, en 2008, un homme autochtone en fauteuil roulant est décédé après avoir attendu des soins pendant 34h dans un hôpital de Winnipeg. Une enquête a déterminé que le personnel de l’hôpital a assumé qu’il s’agissait d’un sans-abri ou qu’il était ivre.
Facteurs aggravants et manque de ressources
L’éloignement de plusieurs communautés autochtones est également un facteur aggravant. Il rend difficile l’approvisionnement en aliments frais et sains, augmentant grandement le risque de problèmes de santé difficiles à contrer. La distance à parcourir pour accéder aux soins de santé et la complexité du transport exacerbent également le taux d’incapacité dans les communautés autochtones.
De plus, les activités traditionnelles aux Premières Nations telles que la chasse et la pêche ont tendance à occasionner des blessures menant à des situations de handicap, qu’elles soient temporaires ou permanentes.
Finalement, la pauvreté et le manque de soutien en santé mentale sont aussi des facteurs qui augmentent sans contredit le taux d’incapacité parmi les Premières Nations.
Les ressources manquent pour adresser tous les enjeux auxquels font face les communautés autochtones. Les problèmes de transport, d’approvisionnement en eau potable et les services limités disponibles pour les personnes aux besoins particuliers sont trop pressants pour que les enjeux plus profonds soient adressés de façon proactive.
Une vision du handicap qui se démarque
La majorité des langues traditionnelles autochtones n’ont pas de mot qui se traduirait par « handicap ». Il y a des mots qui décrivent les différentes déficiences, la difficulté à marcher, les maux de dos ou la perte de vue, par exemple, mais il n’y a pas de terme qui englobe ces différences capacitaires comme un tout défini par les incapacités causées.
Dans la culture traditionnelle des Premières Nations, on priorise l’équité et l’inclusion. La diversité, les besoins particuliers, les différences de chacun forment un tout, une communauté où tout est relié et interdépendant, un collectif. L’idée est que chaque personne a des dons et des talents et peut contribuer positivement à la communauté.
Ainsi, dans la vision traditionnelle autochtone, il n’y a pas de façon idéale d’être, pas de corps ou d’esprit préférable. Les différences capacitaires sont une partie de chaque personne qui permettent d’avoir une relation différente avec la communauté, des expériences et des savoirs variés qui doivent être partagés.
L’accessibilité à mille facettes
L’accessibilité universelle a presqu’autant de facettes qu’il y a de personnes en différence capacitaire.
Pour les personnes handicapées autochtones, l’accessibilité universelle signifie entre autres de pouvoir accéder à des soins de santé adaptés dans le respect à proximité de chez soi et participer à la vie communautaire, mais aussi de pouvoir prendre part aux activités traditionnelles culturelles de leur peuple, par exemple.
L’important pour avoir un impact positif sur la vie des personnes handicapées, qu’elles soient autochtones ou non, c’est de les écouter. Écouter ce que l’accessibilité signifie pour eux et prendre le temps de comprendre comment les plans, les politiques et les mesures peuvent être améliorés pour vraiment jouer un rôle dans l’amélioration de leurs conditions de vie.
À lire également : Conservation du patrimoine bâti et accessibilité universelle : une combinaison possible?
Sources
Du danger d’être Autochtone et d’avoir un handicap au Canada | Commission ontarienne des droits de la personne
Living With a Disability: Visibility Equals Accessibility | First Nation Health Authority
Déstigmatiser le handicap | Magazine de l’Association des femmes autochtones du Canada Numéro 25 mai 2024
Indigenous Concepts of Difference: an alternative to Western disability labeling | Disability Studies Quarterly
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