C’est bien connu, le Québec vit présentement une crise du logement. Quelques jours après le 1er juillet 2024, près de 1700 ménages n’avaient toujours pas trouvé de logement et risquaient de se retrouver sans domicile fixe. À la mi-septembre, le nombre de ménages en situation précaire était toujours semblable.
C’est une situation extrêmement stressante pour n’importe qui, mais pour les personnes ayant une limitation fonctionnelle, les risques sont encore plus grands.
Portrait de la situation
L’accès au logement
L’accès au logement est un droit en plus d’être un facteur primordial du bien-être et de la santé. Et l’accès à un logement accessible est nécessaire pour permettre aux personnes en situation de handicap physique de vivre leur vie de façon épanouie et aussi autonome que possible.
Un logement mal adapté, mal situé, insalubre ou trop cher risque d’avoir un impact majeur sur la santé physique et mentale de son locataire et d’être une source de stress importante.
L’explosion des prix et la rareté croissante des logements dans les dernières années ont eu un fort impact sur l’accessibilité des logements. Pour les personnes en situation de handicap physique qui ont déjà le défi de vivre dans une société qui n’est pas adaptée pour elles, la situation est particulièrement difficile.
Le logement et les personnes en situation de handicap physique
Au Québec, plus de 30% des personnes en situation de handicap gagnent moins de 15 000$ par année. Elles ont moins de chance d’obtenir une éducation postsecondaire, d’occuper un emploi à temps plein et d’avoir accès aux mêmes services que la population qui n’a pas d’incapacité.
Tout cela affecte durement les personnes en situation de handicap physique, qui ont souvent des besoins d’adaptations spécifiques afin de pouvoir vivre dans un logement confortablement et de façon autonome. Besoins auxquels ni les propriétaires ni les constructeurs ne sont tenus de répondre.
Il va sans dire que tout cela leur nuit grandement lorsqu’elles sont en recherche de logement.
À lire également : Crise du logement et déficience intellectuelle : stress et discrimination
Handicap physique et besoins particuliers
Au Québec, en 2017, 70 000 personnes en situation de handicap physique étaient en attente pour un logement adapté à leurs besoins. Il faut dire que parmi les logements sociaux, seulement 1% sont accessibles pour les personnes en fauteuil roulant. Et qu’en général, les logements abordables ne sont que très rarement accessibles. Parce que bien que des subventions existent pour le faire, les propriétaires n’ont pas l’obligation d’adapter un logement pour un locataire qui en aurait besoin.
De plus, les logements qui sont adaptés le sont souvent temporairement. Cela signifie que si le locataire en situation de handicap quitte l’appartement, le propriétaire va souvent retirer les adaptations plutôt que de louer à quelqu’un qui en profiterait.
Les normes d’accessibilités en ce qui a trait aux nouvelles constructions sont quant à elles toujours largement insuffisantes. La seule obligation est qu’une personne en fauteuil roulant puisse visiter le logement sans nécessairement pouvoir y vivre. Et cela s’applique uniquement aux nouveaux immeubles de plus de 9 logements ou de plus 3 étages. Les autres adaptations sont ajoutées sur une base volontaire.
Des situations préoccupantes
Un homme de 54 ans récemment devenu paraplégique à la suite d’un accident doit quitter son logement non adapté situé près de ses aidants naturels et risque de se retrouver en CHSLD faute de pouvoir trouver un logement qui répond à ses besoins et à son budget. Or, se retrouver en CHSLD à 54 ans, c’est très loin d’être idéal. Et c’est démoralisant.
Un autre homme paraplégique a été évincé de son logement adapté à ses besoins, qu’il habite depuis 10 ans est incapable de trouver un autre logement et craint se retrouver à la rue. Ce qui est extrêmement angoissant, en tout temps, mais surtout dans sa situation.
D’un autre côté, des personnes en situation de handicap doivent rester dans un appartement qui n’est pas adapté à leurs besoins. Cela augmente inévitablement les risques de blessures et de chutes. Puis, les hospitalisations et la réadaptation coûtent cher à l’État. En plus de mettre les personnes en situation de handicap physique dans des situations dangereuses, difficiles et décourageantes.
Des solutions possibles?
L’indépendance, l’emplacement, le confort, la sécurité, l’abordabilité et l’intimité sont des caractéristiques qui devraient être accessibles à tous quand on parle de logement.
Comment améliorer la situation pour les personnes ayant un handicap physique?
L’État pourrait adopter une logique d’accessibilité universelle plutôt que cette façon de faire au cas par cas, limitée par les volontés du constructeur.
Selon Martin Lalonde, agent de défense collective des droits chez Ex Aequo, « les municipalités peuvent aussi agir pour qu’il y ait plus de logements accessibles et adaptables. » C’est d’ailleurs le cas de la ville de Vancouver qui a adopté un règlement municipal à cet effet.
Au Québec, il y a plusieurs organismes qui offrent du soutien en termes de logement accessible, dont certains sont des membres du Collectif A.U., découvrez-les :
- Association d’information en logements et immeubles adaptés (AILIA)
- Coalition pour le droit au logement de l’agglomération de Longueuil
- Ex Aequo
Bien entendu, la création de plus de logements abordables pourrait aider à réduire la crise du logement pour tout le monde.
À lire également :
Près de la moitié des personnes ayant une limitation fonctionnelle souffre d’anxiété financière
Conservation du patrimoine bâti et accessibilité universelle : une combinaison possible?
Sources :
Le Soleil – 1667 ménages sans logement: la crise n’épargne aucune région du Québec
Radio-Canada – La crise du logement touche durement les personnes en situation de handicap
Pivot – En situation de handicap, la crise du logement est perpétuelle
Ligue des droits et libertés – La crise permanente du logement accessible
La Presse – La crise du logement, une des causes de stress en psychiatrie
Radio-Canada – Paraplégique et évincé : il craint de se retrouver à la rue
Partager cet article sur :